Catherine Ngila : pour une gestion de l’eau plus durable
Chimie - Lauréate pour l’Afrique et les États arabes
La Professeure Catherine Ngila est récompensée pour ses travaux exceptionnels sur la qualité et la gestion des ressources en eau sur le continent africain. Grâce à des méthodes d’analyse innovantes, fondées sur les nanotechnologies, elle a mis au point de nouveaux moyens de filtrage des polluants industriels. Sa fibre entrepreneuriale et sa rigueur scientifique lui ont déjà permis de jouer un rôle majeur puisque des millions de familles bénéficient d’eau potable grâce à ses travaux.
Ses débuts en chimieLa Professeure Catherine Ngila a persévéré dans ses études, encouragée par son père, ancien chef de tribu – elle a perdu sa mère lorsqu’elle était enfant. Elle a eu la chance d’étudier dans un collège pour filles et c’est là que son intérêt pour la chimie est né, notamment grâce à l’exemple d’un professeur passionné. Quelque temps plus tard, en 1986, elle terminait major de sa promotion à la faculté des sciences de l’Université Kenyatta, où elle a commencé à développer ses travaux sur la gestion des ressources en eau.
Une carrière scientifique d'avant-garde
Compte tenu des difficultés de financement et du manque d’équipements et d’infrastructures des universités et laboratoires de son pays d’origine, la Professseure Catherine Ngila a quitté le Kenya pour poursuivre ses recherches en Australie, où elle a terminé sa thèse en 1996, à l’Université de Nouvelle-Galles du Sud (Sydney). Elle est ensuite rentrée pour enseigner, d’abord au Kenya, à l’Université Kenyatta, puis au Botswana et en Afrique du Sud.
À l’Université de Johannesburg, elle dit avoir eu une « petite révélation » lorsqu’elle a utilisé un procédé électrique de filage de la cellulose pour extraire des nanofibres individuelles. Cela était alors considéré comme impossible car la cellulose ne fond pas et se dissout très peu dans des solvants communs, ce qui rend la séparation des fibres difficile. La Professeure Catherine Ngila et son doctorant, Stephen Musyoka, ont cependant surmonté ces obstacles en utilisant un champ électrique à haute tension dans une solution de cellulose modifiée. Cela a produit des nanofibres en biopolymère, d’un diamètre compris entre 100 et 500 nm, ce qui a permis d’envisager une purification de l’eau à grande échelle.
« Les recherches sur l’eau me tiennent particulièrement à cœur parce que l’eau est tout simplement vitale ! Les nanotechnologies ont un rôle essentiel à jouer dans les techniques de purification. Mon rêve est de développer un nanofiltre commercialisable qui puisse extraire tout polluant en une seule filtration. Cela permettrait d’installer des filtres à eau à des prix accessibles dans tous les foyers ruraux du continent africain. »
La place des femmes dans le domaine scientifique
Bien qu’elle soit aujourd’hui une scientifique reconnue au Kenya – où seules 5 des 31 universités publiques comptent des femmes comme vice-présidentes – la Professeure Catherine Ngila a trouvé difficile de briser le plafond de verre et elle s’est souvent sentie tenue à l’écart des processus décisionnels par ses homologues masculins. À la fois chercheuse, mentor pour de nombreuses jeunes femmes et « faire-valoir féminin » dans plusieurs conseils d’administration et assemblées, elle décrit bien le fardeau et les nombreuses tâches qui incombent spécifiquement aux chercheuses et qui nuisent à leur développement personnel et professionnel.
« La science et l’innovation au meilleur niveau requièrent les talents des femmes autant que celui des hommes. Nous avons besoin des compétences et des valeurs de chacune et de chacun pour créer des dynamiques plus équilibrées et inclusives, jusqu’au plus haut niveau de responsabilité. »
Cela peut même renforcer leur sentiment d’isolement, voire d’exclusion, dans les dynamiques propres à tout laboratoire, ce qui limite d’ailleurs leurs opportunités de carrière. Dans certains cas, cela rend également les femmes plus vulnérables face au harcèlement. La Professeure Catherine Ngila reste plus que jamais résolue à combattre les discriminations de genre.