Professeure Suzana Nunes
Afrique et États Arabes - Chimie
La professeure Suzana Nunes est récompensée pour son travail exceptionnel dans le développement de filtres à membranes innovants permettant de purifier ou de séparer des ressources précieuses, telles que l'eau, le pétrole ou les composés pharmaceutiques, de manière plus efficace et en utilisant beaucoup moins d'énergie que les méthodes traditionnelles.
Travaillant à l'intersection de la chimie, du génie chimique, de la science des matériaux et de la science de l'environnement, ses recherches aboutissent à la création de membranes de haute précision. Son groupe synthétise de nouveaux polymères et les utilise pour fabriquer des feuilles plates et des fibres creuses dont la taille des pores est hautement contrôlée au niveau submicronique ou subnanométrique (jusqu'au millionième de millimètre). Les membranes comportent des couches sélectives capables de séparer des composés pharmaceutiques d'un mélange complexe ou des hydrocarbures spécifiques du pétrole brut.
Environ 50 % de l'énergie actuellement consommée par l'industrie chimique est utilisée pour séparer les produits chimiques. En développant des filtres spécifiques pour chaque type de séparation, la professeure Nunes révolutionne les approches conventionnelles avec des solutions viables, durables et à grande échelle, réduisant ainsi l'empreinte carbone de l'industrie
"Pour participer à la création d'une société entièrement durable, j’utilise la technologie des membranes pour transformer l'industrie chimique en parvenant à zéro émission et en réduisant les déchets", explique-t-elle. "En fin de compte, je veux contribuer à prévenir le réchauffement climatique et à protéger la biodiversité de notre planète pour les générations futures".
Une véritable passion pour la découverte scientifique
La professeure Nunes a toujours aimé les mathématiques et les sciences. Pour son septième anniversaire, elle reçoit un coffret de chimie, et se passionne depuis pour la chimie. À quatorze ans, elle décide de suivre sa vocation scientifique et rejoint un lycée spécialisé en chimie. C'est à l'université qu'elle choisit d'étudier le comportement de macromolécules plus grandes et plus complexes. Peu de temps après son départ pour l'Arabie saoudite, elle connait un premier succès en parvenant à comprendre le mécanisme de formation des pores des membranes de copolymères à blocs grâce à la microscopie électronique. Cela conduit à sa première publication dans le pays et lui permet de reproduire les résultats sur d'autres matériaux et pour d'autres applications. Ses découvertes ultérieures lui ont valu de nombreuses récompenses, dont celle d’intégrer la Royal Society of Chemistry en 2015.
Un parcours international pour promouvoir la durabilité environnementale et inspirer les femmes
La professeure Nunes a travaillé sur trois continents, notamment en Amérique du Sud, son pays d'origine, en Europe et au Moyen-Orient, et collaboré avec des scientifiques dans de multiples disciplines. Lorsqu'elle arrive à l'université des sciences et technologies du roi Abdallah, en Arabie saoudite, en 2009, c'est pour relever les défis environnementaux et inciter les femmes à étudier l'ingénierie. L'université est alors une toute nouvelle entreprise qui crée un centre d'apprentissage académique presque à partir de rien. C'est alors la seule université mixte du pays et de la première à proposer des programmes d'ingénierie chimique de haut niveau aux filles. La possibilité d'attirer davantage de femmes vers les sciences la séduit plus encore que le défi intellectuel ou la promesse d'excellence en matière de recherche et de collaboration internationale. Les fonctions administratives qu'elle occupe, telles que celles de doyenne associée et de vice-principale, lui ont permis d'atteindre cet objectif. En outre, elle a contribué à l'organisation d'ateliers et de symposiums internationaux visant à encourager les femmes à poursuivre des études de chimie et d'ingénierie. "L'Arabie saoudite évolue rapidement, surtout depuis quelques années, et j'ose croire que notre travail dans le domaine de l'éducation a contribué à cette évolution", souligne la professeure Nunes.
A l'assaut du plafond de verre
La professeure Nunes a eu la chance d'avoir des parents et des enseignants très encourageants et d'être née dans un pays où les femmes avaient la possibilité d'étudier et d'avoir des modèles dans le domaine des sciences, de la technologie, de l'ingénierie et des mathématiques (STEM). Elle a commencé sa carrière universitaire au Brésil et a continué à s'épanouir au Centre de recherche Helmholtz en Allemagne. Lorsque sa liberté de recherche et son accès aux ressources ont touché à leurs limites et que le plafond de verre s'est fait sentir, bien qu'elle soit à la tête d'un groupe de recherche performant, elle a déménagé à l'Université des sciences et technologies du roi Abdallah, où elle a trouvé le soutien et les conditions nécessaires pour exceller. "Il faut davantage de soutien pour permettre et aider les femmes scientifiques de haut niveau à franchir le cap difficile de la direction", estime-t-elle.
Elle encourage les filles et les jeunes femmes intéressées par les sciences à suivre leur cœur et leur inclination naturelle à poursuivre une carrière scientifique. "N'abandonnez jamais - le chemin vers le succès n'est pas toujours lisse et droit - persévérez et le succès viendra."